Feuilleton du Journal des Débats .
LES MYSTÈRES DE PARIS . ( 1 )
{ Voyez les N ° » des 19 , 21 , 22 , 25 , 24,25 , 26 , 28 et 29 juin . )
CHAPITRE XI .
l < a Ferme .
La ferme où Rodolphe conduisait Fleur - de - Marie était située en dehors et à l' extrémité du village de Bouqueval , petite paroisse solitaire , ignorée , enfoncée dans les terres , et éloignée d' Ecouen d' environ deux lieues . Le fiacre , suivant les indications de Rodolphe , descendit un chemin rapide j et*entra dans une longue avenue»bordée de cerisiers et de pommiers . La voiture roulait sans bruit sur un tapis de ce gazon fin et ras , dont la plupart des vicinales sont ordinairement couvertes . jTJeur - de - Marie , silencieuse , triste , restait ' , malgré ses efforts , sous une impressiondoufoureuse , que Rodolphe se reprochait presque d' avoir causée . Au bout de minutes , la voiture passa devant la grande porte de la cour de , a forme , continua son chemin le long d' une épaisse t > arini , le ' et s' arrêta en face d' un petit porche de bois rustique a ' iumi ca Ç l » ' sous un vigoureux cep de vigne aux feuilles empOÔT Dr ® ® s par l' automne . -7- Nous voici arrivés , Fleur - de-.,- ar , e » dit Rodolphe , êtes - vous contente ? Oui , monsieur Rodolphe ... pourtant n mo semble A présent que je vais avoir honte devant la fe , v , aiere ; j ° n' oserai jamais la regarder ... Pourquoi cela , mon enfant ? Vous avez raison , monsieur Rodolphe ... elle ne me connaît pas . Et la Ooualeuse étouffa un soupir . On avait sans doute guetté l' arrivée du fiacre de Rodolphe .
( t ) La reproduction des Mystères de Paris est formellement interdite .
.Le cocher ouvrait la portière , lorsqu' une femme de | cinquante ans environ , vêtue comme le sont les riches ; fermjères des environs dis Paris , ayant une physionomie à 1 la fois triste et douce , parut sous le porche et s' avança au- ! devant de Rodolphe avec un respectueux empressement . ! La Goualeuse devint pourpre , et descendit de voiture après un moment d' hésitation ... Bonjour , ma bonne madame Georges ... dit Rodolphe à la fermière , vous le voyez , je suis exact ... Puis , se retournant vers le cocher et lui mettant de l' argent dans la main : Tu peux t' en retourner à Paris , Le cocher , petit homme trapu , avait son chapeau enfoncé sur les yeux et la figure presque entièrement cachée par le collet fourré de son karrik ; il empocha l' argent , ne répondit rien , remonta sur son siège , fouetta son cheval et disparut rapidement dans l' allée verte . Après une si longue course , ce cocher muet est bien pressé de s' en aller ... pensa d' abord Rodolphe . Bah ! il n' est que deux heures ; il yeut être assez lût de retour à Paris pour pouvoir utiliser le restant de sa journée . Et Rodolphe n' attacha aucune importance à sa première observation . I Fleur - de - Marie s' approcha de lui , l' air inquiet , troublé , presque alarmé , et lui dit tout bas , de manière à n' être pas entendue de M OlO Georges ? • Mon Dieu 1 monsieur Rodolphe , pardon ... Vous renvoyez la voiture ... Mais l' Ogresse ? hélas ! ... Il faut que je retourne chez elle ce soir sinon elle me regardera comme une voleuse ... Mes habits lui appartiennent ... et je lui dois . , . Rassurez - vous , mon enfant , c' est à moi à YOUS demander pardon ... Pardon ! ... et de quoi ? De ne pas vous avoir dit plus tôt que vous ne deviez pius rien à l' Ogresse et que vous pouviez quitter ces ignobles vêtemens pour d' autres que ma bonne M mc Georges va vous donner . Eile en a à peu près dê voire taille , elle voudra bien vous prêter de quoi vous habiiier ... Vous ! e voyez , elle commence déjà son rôle de tante . Flenr - de - Marie croyait rêver ? elle regardait tour à tour la fermière et Rodolphe , ne pouvant croire àce qu' elle entendait . Comment , dit - elle , la voix palpitante d' émotion ,
je ne retournerai plus à Paris ? ... je pourrai rester ici ? Madame .... me le permettra ? ... ce serait possible ! ... ce château en Espagne de tantôt ? C' était cette ferme ... le voilà réalisé ... Non , non , ce serait trop beau ... trop heureux ... On n' a jamais trop de bonheur , Fleur - de - Marie ... Ah ! par pitié , monsieur Rodolphe .... ne me trompez pas , cela me ferait bien mal . /"/ —Ma chère enfant , croyez - moi , —dit Rodolphe d' une voix toujours affectueuse , mais ayec un accent de dignité que Meur - qe - Mario ne lui connaissait pas encore , 0ui .... vous pouvez , si cela vous convient , mener dès aujourd'hui auprès aeM mo Georges , celte vie paisible dont tout à l' heure le tableau vous enchantait .. . Quoique M rae Georges ne soit pas votre tante , elle aura pour vous , lorsqu' elle vous connaîtra , le plus tendre intérêt ; vous passerez même pour sa nieee , aux yeux des gens de la ferme ; ce petit mensonge rendra votre position plus convenable . , .. Encore une fois.7 .. si cela vous piait , Fieur - da - Msrie , vous pourrez réaliser Vptj' e reye de tantôt . Dès que vous serez habillée en petite fermiere , —ajouta - t - il en souriant , nous vous mènerons voir votre future favorite , Muselle , jolie génisse blanche , qm n attend plus que le collier que vous lui avezproniis .... Nous irons aussi ejonner un coup d' œil à vos amis jes pigeops , et puis à là laiterie ; nous parcourrons enfin toute la ferme ; je tiens à remplir ma promesse . Fleur - de - Marie joignit les mains avec forçe , -Ça surprise , la joie , la reconnaissance , le respect se peignirent sur sa ravissante figure ; ses yeux se noyèrent de larmes , elle s écria ; ' • ' -=- Monsieur Rodolphe ... vous êtes donc un ange du bon JJieu , que vous faites tant de bien aux malheureux sans les connaître 1 et que vous les déli - rez de la honte et de la misère ! ! ! , Ma pauvre enfant , répondit Rodolphe avec un sourire de mélancolie profonde et d' ineffable bonté , quoique bien jeune , j' ai dans ma vie déjà souffert ... cela vous explique ma compassion pour ceux qui souffrent . Eleur - do- Marieou pl otô l Marie , alleza vç c M G earges ... Oui , Marie , gardez désormais pe pom , doux et joli nom comme yous ! Avant mon départ , nous causerons ensemble , et je vous cmiltenû bien heureux ... de vous savoir heureuse . Fleur - de - Marie ne répondit rien , s' approcha de Rodolphe , fléchit à demi les genoux , et prit sa main qu' elle porta rcs-
.... S' ° TSd«AI lôvre ! ™ « • « iiiSêt prefonî ! ' M ™ Georses ' ' /"/ ' ia « M * * , w „ CHAPITRE XII .
Margli ® â Kaiîolp' fte »
Rodolphe so dirigea vers la cour de i a „ . 1 homme de grande taille qui la veiilû décisif en S * bonmer , était venu l' avertir do l' arrivé d ? Tom et de Sa- /"/ Murph , tel est lo nom de ce p - enshn » » • , < » , • ans environ ; quelques mèche ■ m ? n l uante petites touffes de cheveux â „ S bond vlf^T' r '' '' /"/ 1 chaque côté de son crin/ Dion . ! vu qui frisaient de sjui su » se » joues rebondies . Malgré son â < fo et s , m ■ £ . qonpoint , Murph était aierte et robusip s / ni.t î ™ quoique phlegaaatique , était à lu fois bienveil' aii ? résolue ; u portait une cravatte blanche , un gr&ufo aup ! et tin long habit noir à larges basques- sa , î - jf g , ' . ' gris verdâtre , était iie même étoffe que ses hm » /"/ Fifo- fa /"/ » 3 /"/ 6 ' » 110 re i oi ff nant Pas tout-à-fait fus dcrue . • lm /"/ * « « ■ te * W ? . « tSS ' L' habillement et la mâle tournure de Mu mis r-.r .- n-1 • . e type parfait de ce que les Anglais appelleaMo P . ' ? • ? ' homme - fermier . Hâtons - nous d' ajouter nue M , » ' r et ? Anglais gentilhomme ( squire ) , mais non ferSim P ' otait Au moment où Rodolphe entra dans la cour as,,- i mettait dans la poche d' une petite calèche de vôr l ! re /"/ /"/ paire de pistolets qu' il venait de soigneusement Se /"/ /"/ 6 ' folpht en aS /"/ IU aV6C tus pistolets ? - foi àîi r o _ . -- Cela me regarde , Monseigneur , dit M - irih « u i cnndant du marchepied . Faites - vos affofoa • / l des ~ /"/ miennes . • ' /"/ T /"/ ' , .fo tais les— Pour quelle heure as - tu commandé les chev - v v • > b , 1 lon vos ordres , à la nuit tombante . lu es arrivé ce matin ? ... A huit heures . M » « Georges at u fo' t , i«t - parer , ° - « otou - dè fo ! H pp,,^